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Vers une base de données hydro-climatiques en Haïti disponible au grand public

Dans le cadre du projet CLIMEXHA (Anticiper les événements CLIMatiques EXtrêmes sur HAïti pour un développement durable) financé par le fonds BRH pour la recherche et le développement, et du Laboratoire Mixte International CARIBACT (Institut de Recherche pour le Développement, Université d’Etat d’Haïti), le professeur Ralph Bathelemy rassemble des données hydro-climatiques sur le XXe siècle et construit la base de données Simbi, première base de données hydro-climatiques pour Haïti à la fois documentée et disponible en libre accès (https://doi.org/10.23708/02POK6).


La plupart des modèles climatiques prévoient une augmentation des cyclones majeurs et une intensification des périodes de sécheresse dans la Caraïbe en général et en Haïti en particulier. Pour des prévisions locales précises, un système d’observation climatique fiable et robuste est nécessaire. En effet, pour étudier l’évolution du changement climatique il faut d’abord : 1) une base de données climatiques de qualité sur plusieurs décennies afin de comprendre le climat passé ; et 2) un système d’observation permettant de mesurer les paramètres climatiques (pluie, température de l’air, pression atmosphérique, direction et vitesse du vent, etc.) et d’étudier leur évolution dans le temps et dans l’espace pour prédire et anticiper leur évolution future.





Qu’il s’agisse de séismes ou de cyclones, on aimerait pouvoir anticiper l’arrivée des événements majeurs (événements rares et extrêmes) pour la protection des vies et des biens. Quelle est la probabilité pour qu’un séisme, un cyclone ou une crue extrême ait lieu à un endroit donné dans les prochaines années ? Pour répondre à cette question, les scientifiques font souvent appel à la mémoire historique. Si par le passé une rivière donnée connut une crue dont la probabilité de dépassement annuel est de 2% (période de retour de cinquante ans), il y a fort à parier que cette crue fera son apparition dans le futur et peut être même beaucoup plus fréquemment à cause du changement climatique.


Plus longues sont les séries de données historiques, plus précises seront les prévisions. Mais, où trouver ces données ? Elles se retrouvent éparpillées dans des bulletins hydrométéorologiques historiques sauvegardés sous forme papier, des récits d’historiens, dans des lettres écrites à des autorités pour demander de l’aide ou d’autres appels au secours, dans des journaux à travers des reportages de journalistes, entre autres. Les descriptions qui s’y trouvent ne sont pas souvent exploitables à des fins scientifiques, cependant elles ont le mérite de pointer l’événement et sa date d’occurrence, voire certains de ses effets sur la population. Difficile de demander plus à nos ancêtres.


Des données hydro-climatiques ont été enregistrées avec soin en Haïti dès la fin du XIXe siècle. Ces données, datées de 1888 à 1980, sont disponibles au format papier dans plusieurs institutions haïtiennes dont la Bibliothèque Haïtienne des Spiritains (BHS). Sauvegarder ce patrimoine national et le rendre disponible à tous est fondamental pour une meilleure connaissance du territoire haïtien et pour anticiper les évolutions climatiques futures.


Dans le cadre de sa thèse de doctorat réalisée en co-tutelle entre l’Université d’Etat d’Haïti (UEH) et l’Université Côte d’Azur (France), Ralph Bathelemy travaille sur la numérisation de ces archives hydro-climatiques. Ce projet vise à numériser 16 registres de données hydro-climatiques qui furent collectées par l’observatoire du Petit Séminaire Collège Saint Martial sur plus d’une cinquantaine de stations réparties dans le pays entre 1888 et 1966, et des mesures de débits de rivières au niveau de 70 stations entre 1918 et 1940 collectées par la Division Hydrographique du Service d'irrigation de la direction générale des travaux publics lesquelles ont été déjà numérisées vers les années 1980. L’objectif de ce travail est de produire une base de données hydro-climatiques bien documentée sur Haïti et disponible au grand public.


L’effort d’allonger ce catalogue de données se poursuit. Parallèlement à la constitution de la base de données hydro-climatiques sur Haïti, Ralph Bathelemy travaille également sur le projet RECICAMET (Réseau Citoyen de Capteurs Hydrométéorologiques) financé par le Fond d’Appui à la Recherche de l’UEH et le Fonds Vert pour le Développement dans le cadre du développement d’un Plan National d’Adaptation (PNA) au changement climatique. Ce projet vise à déployer un réseau hydrométéorologique pour la recherche académique et poursuit un double objectif : 1) densifier le réseau existant permettant ainsi de mieux étudier l’hydrologie des bassins versants haïtiens et de mieux évaluer l’impact du réchauffement climatique sur les ressources en eau, l’hydroélectricité, l’agriculture, etc. ; et 2) installer ces stations principalement dans les écoles afin d’inciter les citoyens plus particulièrement les écoliers et les étudiants à la science participative. Des étudiants de la faculté des sciences de l’UEH sont impliqués activement dans ces deux projets via des stages et des projets de fin d’études. Six stations sont déjà installées : quatre sur le bassin versant des Cayes dans le sud d’Haïti et deux à Port-au-Prince.


Disposer d’un long catalogue de données permettra de repérer les événements majeurs comme étant des référentiels hydrométéorologiques à l’échelle nationale. Ces valeurs de pluviométrie (hauteur de pluie) et de débits de référence fiables sont essentiels pour pouvoir anticiper les risques d’inondation et mieux dimensionner les ouvrages hydrauliques (canaux, barrages, digues, etc.).


Ralph Bathelemy soutiendra sa thèse intitulée « Monographie hydrologique d'Haïti: analyse et prédétermination des pluies et crues fortes à partir de données d'archives et satellitaires » le 14 décembre prochain à l’Université Côte d’Azur. C’est l’aboutissement d’une thèse réalisée dans le cadre du programme doctoral Anténor Firmin (BRH/AUF/IRD/SCAC). Déjà chargé de cours au programme de master en géosciences de la faculté des sciences, le nouveau docteur sera aussitôt opérationnel en Haïti.


Newdeskarl Saint Fleur


L'article original a été publié dans Le Nouvelliste.



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